La bière, boisson fermentée, est sans aucun doute la boisson
la plus vieille du monde mais elle est aussi la plus naturelle. Depuis plus
de 4000 ans la bière est brassée à partir de matières
premières saines et naturelles que sont l'eau, l'orge (ou malt), le houblon
et la levure. Selon les dosages de ces ingrédients, l'arôme, l'amertume,
la nuance de la robe sont modifiés ce qui crée différents
types de bières. Toutefois, la véritable qualité d'une
bière dépend du tour de main du maître brasseur.
Chaque bière est unique !
Les matières premières
L'eau est le principal élément constitutif de la bière.
Elle représente plus de 95% de son volume (les 5% restants étant
de l'alcool). La qualité de l'eau est donc très importante et
doit être extrêmement contrôlée. Une bonne eau de brassage
doit être décontaminée de tous microorganismes donc stérilisée,
doit être exempte de toxines. L'eau est le plus souvent traitée
directement en brasserie grâce à des cartouches purificatrices,
toutefois, il existe encore quelques petites brasseries qui puisent leur eau
directement dans la nappe souterraine située sous la brasserie. Une eau
irréprochable est la garantie d'une bière de qualité.
L'orge est une céréale assez résistante à un climat
rude, sa culture peut donc se faire dans une grande partie du monde ce qui explique
le succès de cette boisson. Les deux variétés employées
en brasserie sont : Hordeum disticum et Hordeum hexasticum. L'orge subit le
maltage avant d'être utilisé en brasserie et donner à la
bière son arôme et sa couleur. La composition chimique de ce malt
d'orge favorise la stabilité de la mousse et "sucre" en partie
la bière. Toutefois, le remplacement d'une partie de l'orge par du froment
malté permet la fabrication de bières blanches.
Il n'y a pas de bière sans houblon. Cette plante est d'ailleurs qualifiée
"d'or des brasseurs" tant son rôle est essentiel dans l'élaboration
d'une bonne bière. Le houblon, plante vivace, appartient à la
famille des Cannabinacées et peut vivre plus de 50 ans. La récolte
des cônes de houblon se fait en août-septembre mais seuls les pieds
femelles sont utilisés en brasserie car ils sécrètent une
résine, la lupuline, matière noble du houblon. Cette lupuline,
riche en huiles essentielles, apporte l'arôme tandis que la résine
(amère) confère l'amertume à la bière.
C'est Pasteur qui a découvert en premier l'agent responsable de la fermentation
de la bière : la levure. Cette levure confère alors des qualités
organoleptiques (arôme), est responsable de la fermentation par transformation
enzymatique des sucres en alcool et donne le pétillant à la bière
grâce à l'apport de CO2 (qui est aussi un produit de la fermentation).
En brasserie, deux espèces de levures sont utilisées :
- Saccharomyces cerevisiae qui fermente à des températures allant
de 20°C à 30°C et qui surnage à la surface en fin de fermentation.
Cette souche est aussi appelée levure de fermentation haute.
- Saccharomyces uvarum ou levure de fermentation basse, qui fermente à
basses températures (8 - 12°C) et qui sédimente en fin de
fermentation.
Cependant, au sein de ces deux types de levures il existe une multitude de variétés
de souches qui possèdent toutes leurs propres propriétés
physiologiques (comme la vitesse de sédimentation, de production d'arôme...)
ce qui explique le caractère unique de chaque bière.
Le processus de fabrication
Le maltage
Les grains d'orge sont mis à germer 5 à 6 jours par trempage puis exposition à la chaleur (80°C) ce qui transforme l'orge en malt. Suit ensuite le touraillage ou torréfaction qui donne à la bière un arôme et une couleur plus ou moins prononcée. Le touraillage confère sa couleur au malt : pâle (pour les bières blondes), cuivrée (bières ambrées) ou sombre (bières brunes).
Le brassage
Le brassage proprement dit
Le brassage représente la mise en solution des matières solubles
du malt et des grains crus afin de récupérer le maximum de sucres
contenus dans le malt. Pour cela, le brasseur monte le malt en température
pour activer de façon optimale ses enzymes qui hydrolysent l'amidon (contenu
dans le malt) en sucres simples (maltose, glucose, maltotriose....). Ce sont
ces sucres qui seront transformés en alcool après fermentation
des levures. Cette étape dure environ deux heures.
La filtration du moût
En fin de brassage, il est nécessaire de séparer le jus sucré
(le moût) des pailles du malt (les drêches) ; c'est ce que l'on
appelle la filtration du moût. Pour cela nous récupérons
le brassin entre des plaques filtrantes assemblées les unes contre les
autres et séparées par des toiles. L'opération est renouvelée
jusqu'à obtention d'un moût clair. De plus, afin de récupérer
le maximum de sucre un lavage des drêches à l'eau chaude est indispensable.
La cuisson du moût
Le but de la cuisson du moût est sa stérilisation et son aromatisation
avec le houblon. En effet, si le moût n'est pas stabilisé, il y
a des risques de développement de germes donnant un mauvais goût
à la bière. La cuisson permet dans un premier temps d'évaporer
certains composés indésirables et dans un deuxième temps
de bloquer toutes les actions enzymatiques du brassage.
L'apport du houblon est essentiel durant l'étape de cuisson. Son ajout
en début de cuisson confèrera à la bière son amertume
(grâce aux résines amères de la lupuline), celui ajouté
à la fin apportera ses arômes.
La durée de cette cuisson varie de 45 min à 3 h selon la coloration
du moût que le maître brasseur désire.
Le coulage
Après l'ébullition, il est nécessaire d'enlever du moût
les résidus de houblon (ou trub) avant d'effectuer le refroidissement,
l'aération et la fermentation du moût. Nous effectuons d'abord
la clarification du moût par utilisation du système de décantation
Devreux. Nous laissons décanter le trub dans une cuve cylindroconique
et récupérons le moût grâce à un tuyau de récupération
situé sur un flotteur.
Le moût est ensuite refroidi très rapidement (à 14 - 16°C)
par un circuit de refroidissement afin de le maintenir stérile. A la
sortie de l'échangeur, le brasseur envoie de l'air stérile dans
le moût afin que celui-ci soit enrichi en O2, O2 indispensable pour la
mise en fermentation des levures.
La fermentation
La fermentation correspond à l'ensemble des processus biochimiques qui
conduit à la transformation de 80% des sucres fermentescibles du moût
en alcool éthylique. Plus la température de fermentation est élevée,
moins longue sera la durée de cette étape. Ainsi, il faut compter
une dizaine de jours pour une fermentation basse à 8°C alors qu'il
ne faut que 5 jours environ pour une fermentation haute à 24°C.
Néanmoins, il faut également tenir compte de la concentration
du moût en sucre (plus il y a de sucre plus il faudra de temps à
la levure pour réaliser la transformation). La vitalité de la
levure est aussi importante quant à la vitesse de démarrage du
processus. Ainsi, le brasseur veille à utiliser une souche de levure
qui "démarre" rapidement la fermentation.
Mais la fermentation ne se limite pas seulement à la production d'alcool,
selon la souche de levure utilisée (et les matières premières),
la fermentation produit de nombreux arômes.
Les levures libèrent aussi du CO2. Ce CO2 est très important car
il donne à la bière son pétillant et sa mousse.
La garde et la filtration
Juste après la fermentation, la bière est dite "jeune"
car elle ne possède pas encore son caractère définitif.
La bière évolue encore de façon importante et afin d'affiner
ses arômes, on procède à sa maturation pendant plusieurs
semaines en tanks de garde (cuves horizontales). La garde correspond donc au
maintien de la bière (pendant quelques semaines à plusieurs mois)
à une température de 0°C.
La garde est utile pour l'élimination de composés néfastes
à l'arôme de la bière, permet à la levure de se déposer
au fond de la cuve, apporte la rondeur à la bière et le moelleux.
De plus, la garde permet la saturation de la bière en dioxyde de carbone
(6g de CO2/L) ce qui lui donne le pétillant et le goût rafraîchissant.
Suit ensuite la filtration de la bière. Filtration qui n'est toutefois
pas obligatoire pour avoir une bière de qualité, mais qui permet
d'obtenir un produit très clair, brillant, d'une stabilité irréprochable
et d'éliminer les levures restantes et autres résidus en suspension.
L'agent filtrant s'appelle le kieselguhr. Ce sont des Diatomées (algues
microscopiques) qui, en se fossilisant, donnent une roche blanche, légère
et très poreuse. Cette roche est chauffée et broyée avant
d'être utilisée. La filtration se fait sous pression de CO2 à
0°C afin d'une part de favoriser la dissolution du dioxyde de carbone, et
d'autre part, de protéger la bière de toute infection.